Mon seul lien avec le gospel résidait dans ma passion, quand j’étais gamine, pour le film Sister Act. Whoopy Goldberg, en fausse bonne sœur déjantée, prend la tête de la chorale de l’église et transforme les cantiques classiques en flamboyants gospels (rappelez vous, çaaaaa ou encore celle-ci ❤ ). Il m’arrivait de chanter ces morceaux (mal, bien entendu), ma brosse à cheveux en guise de micro. Et puis j’ai grandi et j’ai arrêté de faire ces trucs bizarres (ou pas – vous n’en saurez rien). C’était sans compter sur Ol’Moses Gospel Choir, la chorale créée par le choriste Moïse Melende, à Choisy-au-Bac, en 2008. Après une pause de deux ans, l’ensemble s’est reformé il y a quelques semaines. Un jeudi soir, je me glisse au sein d’une répétition.
Moïse Melende, chanteur charismatique à la voix de velours, encadre les choristes (pour le découvrir, c’est ici). Ambiance décontractée : le pianiste, Ben, sort des blagues toutes les deux minutes. L’échauffement des voix est nécessaire : en avant pour les exercices vocaux à base de « ahaha – ohoho ». Je me place du côté des altos, dont la tessiture vocale se situe au-dessus des sopranos (les plus aigus) et sous les ténors, plus graves. « J’étais chez les sopranos, au début, m’explique ma voisine en riant. Ma voix a changé, sans doute parce que je suis fumeuse ! Si ça continue, je vais finir chez les ténors ». Les choristes entament ensuite un gospel dont les paroles sont simples à retenir : il n’y a que le mot « Amen ». Mais la difficulté est de chanter selon sa tessiture de voix, tout en écoutant les autres. Je tâche de me relaxer et je me lance. Mais rien ne sort véritablement de ma bouche. Comment font mes voisines pour avoir autant de puissance vocale ? « Il faut que ça vienne du ventre, m’explique Pauline, une choriste, certains exercices de respiration aident à obtenir ce résultat ».
Une voix, issue du corps frêle d’une jeune femme, s’élève au dessus des autres : c’est Sam, une chanteuse qui entame ce qu’on appelle un « lead », c’est-à-dire un passage chanté au-dessus des voix des autres choristes.
On enchaîne avec un autre morceau, qui me rappelle quelque chose… Il s’agit de « Oh Lordy », un gospel reprit par Moby dans son succès « Natural Blues ». Alors que je tâche de suivre la partition, j’ai la chair de poule en entendant toutes ces voix. « Il m’est arrivé d’entendre des chorales dans lesquelles aucun choriste, pris individuellement, ne savait chanter, m’assure Laetitia Melende, l’épouse de Moïse qui gère également la carrière du chanteur, mais réunis tous ensemble, le résultat était époustouflant ».
Lorsque Moïse repère une voix, il n’hésite pas à faire travailler le ou la choriste, parfois même individuellement. C’est le cas de Lauren, qui a débuté il y a quelques années sans savoir chanter. « Elle avait un grain de voix tellement spécial… explique Laetitia. Maintenant, elle fait de très beaux leads durant les concerts. Elle est douée et passionnée ».
La répétition se termine vers 22h. Une Whoopy Goldberg chantant du Moby hantera ma nuit suivante. Oh Lordy, trouble so hard…